Crémant de Bourgogne : tout n’est pas « noir » dans le « blanc de noirs »…

Décision de justice
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Le tribunal administratif de Dijon a annulé, par un jugement du 29 novembre 2022 l’injonction administrative qui avait été adressée le 21 avril 2021 par la direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités de Bourgogne-Franche-Comté à la SA Les petits-fils de Veuve Ambal, et qui lui imposait de supprimer la mention « blanc de noirs » sur les étiquettes des bouteilles de crémant de Bourgogne.

La SA Les petits-fils de Veuve Ambal, installée à Montagny-lès-Beaune, fabrique et commercialise des vins d’appellation d’origine contrôlée Crémant de Bourgogne. Le litige soumis au tribunal, dans lequel est également intervenu le syndicat professionnel Union des producteurs élaborateurs de crémant de Bourgogne, au soutien de la demande de la société, portait sur la possibilité d’apposer la mention « blanc de noirs » sur les étiquettes de bouteilles de crémant issu de la fermentation de jus blanc de raisins noirs (cépages pinot et gamay), mais dont les produits œnologiques, utilisés dans les différentes étapes de la  vinification, comprenait du jus blanc issu de raisins blancs (cépages chardonnay et aligoté).

 

La production du crémant repose en effet sur différentes étapes de vinification pour provoquer la fermentation alcoolique et malolactique, et, pour établir le caractère « effervescent »[1] du vin ainsi que son dosage en sucres, par l’introduction de la liqueur de tirage et de la liqueur de dosage (ou liqueur d’expédition).

 

L’administration fondait sa décision en considérant que cette pratique consistant à utiliser du jus issu de raisins blancs pour fabriquer du « blanc de noirs » était de nature à induire le consommateur moyen en erreur sur les qualités substantielles des vins concernés et sur leur mode de fabrication.

 

Le tribunal a tout d’abord constaté que la méthode de fabrication du « blanc de noirs » ne faisait l’objet d’aucune définition légale, et que son apposition était néanmoins autorisée par les textes applicables.

 

Il a ensuite relevé que la composition des produits de vinification et des liqueurs utilisées à cet effet, constituait l’un des éléments essentiels du savoir-faire du vinificateur (parfois même des « secrets de fabrication ») et contribuait très significativement aux qualités organoleptiques du produit final.

 

Pour cette raison, dès lors que ces produits œnologiques représentent moins de 5 % du produit final, que le jus de raisins avant fermentation était, dans le cas qui lui était soumis, exclusivement issu de cépages noirs, le tribunal a jugé que le comportement du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif, était insusceptible d’être altéré de manière substantielle par cette pratique, susceptible de contribuer à une vinification de qualité.

 

Le tribunal en a déduit que le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités de Bourgogne-Franche-Comté avait commis une erreur d’appréciation.

[1] D’un point de vue sémantique, le crémant de Bourgogne appartient à la catégorie des vins mousseux, qui eux-mêmes font partie de la famille des vins effervescents.

Voir le jugement n°2102080